2 Octobre 2023

Les échantillons de l’astéroïde Bennu arrivent sur Terre !

Le retour d’échantillons est une étape cruciale pour l’étude des objets du système solaire. C’est aussi la plus complexe. C’était la mission d’OSIRIS-Rex, de la NASA, en partenariat avec plusieurs laboratoires français soutenus par le CNES, dont la capsule d’échantillons a atterri dans le désert le 24/09/2023.

La capsule de retour d’échantillons de la mission OSIRIS-REx de la NASA prise en photo après son atterrissage dans le désert dimanche 24/09/2023, sur le terrain de tests et d’entrainement de l’Utah du Département de la Défense étatsunien. Les échantillons ont été collectés sur l’astéroïde Bennu en octobre 2020 par la sonde OSIRIS-REx de la NASA - Crédits : NASA/Keegan Barber.

   

OSIRIS-REx n’est pas la première mission de retours d’échantillons extraterrestres. On pense notamment à la sonde Stardust de la NASA qui a rapporté du matériel cométaire ou à la sonde Hayabusa-2 de la JAXA qui a ramené sur Terre des échantillons de l’astéroïde Ryugu. Mais alors, qu’apportera de plus l’analyse des échantillons de l’astéroïde Bennu ? Selon Francis Rocard, astrophysicien et responsable de l’exploration du Système solaire au CNES : « La  particularité des astéroïdes c’est que leur diversité est considérable : il y a tout un bestiaire des astéroïdes, depuis les plus primitifs, les plus carbonés, jusqu’à des objets très évolués comme Psyché qui est un astéroïde métallique ».

Il est donc nécessaire d’étudier un grand nombre d’astéroïdes différents et de compositions différentes pour comprendre finement leur origine et leur évolution.

Bennu étant un astéroïde carboné de type C, on s’attend à y trouver une grande richesse de molécules organiques, qui sont composées à partir de longues chaines d’atomes de carbone. Leur étude peut permettre d’en apprendre plus sur l’origine de la vie sur la Terre, celle-ci s’étant formée par l’accrétion de corps similaires aux astéroïdes actuels, les planétésimaux du Système solaire d’il y a 4,5 milliards d’années. Et il se trouve que Bennu contient plus de carbone que Ryugu, on s’attend donc à trouver plus de molécules organiques dans ces nouveaux échantillons !

 

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Le saviez-vous ?

La forme particulière de diamant à deux pointes des astéroïdes Bennu et Ryugu est due à leur vitesse de rotation importante et leur faible masse. Ces objets sont trop peu massifs pour être sphériques comme la planète naine Cérès : leurs constituants sont alors en proie à la force centrifuge causée par leur rotation et tombent en avalanche vers leur équateur.

Légende photo : Les astéroïdes Bennu (525 mètres de diamètre, cible de la mission OSIRIS-REx) et Ryugu (1 kilomètre de diamètre, cible de la mission Hayabusa 2 de la JAXA) ont une même forme de toupie - Crédits : ESA.

   

Le rôle du CNES dans la mission OSIRIS-Rex

Si le CNES n’a pas contribué directement à la mission OSIRIS-REx, il soutient un certain nombre de scientifiques français qui travaillent au sein de plusieurs laboratoires : 

  • LAGRANGE, pour l’étude de la dynamique et évolution du régolithe, et du lien avec les météorites carbonées ;

https://lagrange.oca.eu/fr/accueil-lagrange

  • Le LESIA, impliqué dans des groupes de travail sur la minéralogie et la caractérisation physique ; 

https://lesia.obspm.fr

  • GeoAzur, pour l’étude du régolithe et du lien avec les météorites carbonées ; 

https://geoazur.oca.eu/fr/acc-geoazur

  • Le CRPG, impliqué dans l’analyse des gaz, gaz rares, rapports isotopiques, et datation des échantillons. 

https://crpg.univ-lorraine.fr

 Le financement de ces laboratoires est géré directement par la Direction de la Stratégie du CNES, représentée par Francis Rocard.

Les objectifs de la mission OSIRIS-REx sont nombreux. Sa principale mission était de collecter des échantillons sur l’astéroïde Bennu et de les rapporter sur Terre. Des objectifs secondaires ont été et seront réalisés avec des instruments à bord de la sonde, tels que l’analyse et la cartographie de l’astéroïde.

  

Retour sur Terre : un trajet sous haute surveillance 

La capsule contenant les échantillons de Bennu a été larguée quelques jours avant le 24/09/2023, date à laquelle elle a effectué une entrée balistique dans l’atmosphère de la Terre, protégée de son bouclier thermique, pour atterrir dans le désert de l’Utah aux Etats-Unis. Il a fallu surveiller la descente pour retrouver la capsule puis vérifier au sol pour qu’il n’y a pas eu de fuite de son contenu, et que celui-ci n’a pas été contaminé par l’environnement terrestre.

Une fois la capture effectuée, la capsule a été envoyée par hélicoptère au Johnson Space Center et placée dans une salle blanche spéciale où les premières analyses d’urgence, non destructrices, vont être faites : avant même l’ouverture de la capsule, le gaz contenu autour des échantillons va être pompé puis analysé.

Ensuite, toute une équipe scientifique internationale, instigatrice de la mission, d’environ 200 personnes, est chargée des premières campagnes d’analyses. Pour cela, environ un quart de la masse totale d’échantillons sera utilisée.

Pour les trois quarts de la masse restante d’échantillons, des accords ont été passés avec le Canada, qui en recevra 4 %. Le Japon en recevra quant à lui 0,5 %. Le reste sera proposé à la communauté scientifique internationale et sera accessible par le biais d’appels à propositions visant à étudier ces matériaux avec des méthodes originales, comme c’est le cas depuis 50 ans pour les roches lunaires rapportées par les missions Apollo.

  

De quelle masse totale d’échantillons parle-t-on ?

D’après Francis Rocard, la masse totale d’échantillons s’élève au minimum à 60 g. Cependant, les quantités estimées aujourd’hui seraient de 200 à 500g et on pourrait même s’attendre à trouver jusqu’à 2kg de matériaux dans la capsule ! Cette incertitude des prédictions est due à la méthode du prélèvement réalisé par la sonde. « Le système de prélèvement était assez original. Cela consistait à plaquer un disque sur la surface, et dès que ce disque était au contact, on envoyait un gaz d’azote sous pression qui allait souffler les échantillons et les rentrer dans le disque », explique Francis Rocard. L’avantage de cette méthode est qu’on a pu récolter beaucoup de matière. L’inconvénient est qu’avec cette abondance de matériaux, la fermeture du disque n’a pas été aisée… Ce petit incident a contraint les responsables de la mission à abandonner la procédure de mesure de la masse des échantillons afin de ne pas avoir de perte partielle ou totale du contenu de la capsule d’échantillons. On ne connaîtra par conséquent la masse de matériaux récoltée qu’à l’arrivée de la capsule au Johnson Space Center.

Désormais, de nombreuses méthodes de mesures vont être employées par l’équipe scientifique de la mission pour percer les mystères de l’astéroïde Bennu, sur des portions d’une centaine de milligrammes par sous-équipe. Les premières publications sur les résultats devraient paraître entre octobre 2023 et février 2024. 

Pour la sonde OSIRIS-REx, la mission continue. Après avoir largué sa capsule, elle continue sa course autour du Soleil pour un rendez-vous avec l’astéroïde géocroiseur Apophis, qui survolera la Terre à 30 000 km d’altitude en avril 2029.

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